La fierté se résume à célébrer et à soutenir la communauté LGBTQIA2S+ (Lesbiennes, Gais, Bisexuels, Transgenres, Queer ou en Questionnement, Intersexe, Asexuels et Bispirituels et toute autre personne qui s’identifie à la communauté queer et trans). C’est aussi l’occasion de célébrer la diversité humaine et de réfléchir au travail continu nécessaire pour garantir des espaces sécuritaires et inclusifs pour tous les enfants, toutes les familles, toutes les éducatrices et tous les éducateurs.
En tant qu’éducatrice queer et non binaire (et parent d’un enfant d’âge préscolaire dynamique), Cora Payne, EPEI (elle/ielle), est extrêmement attachée et très dévouée à la diversité, l’équité et l’inclusion. En plus d’être EPEI, Cora est également enseignante agréée de l’Ontario (EAO) et détient un baccalauréat en éducation ainsi qu’un baccalauréat ès arts en psychologie de l’enfance. Actuellement facilitatrice auprès de personnes ayant des besoins diversifiés à Chıldınü Oxford, dans le comté d’Oxford du sud-ouest de l’Ontario, Cora axe toute sa carrière sur son engagement à créer des environnements où chaque enfant, chaque famille et chaque éducatrice ou éducateur ressent un profond sentiment d’appartenance.
Pour en savoir plus sur l’importance de la fierté et sur la façon dont les EPEI peuvent contribuer à créer des milieux sécuritaires, accueillants et inclusifs pour tous les enfants et toutes les familles, nous avons parlé à Cora pour connaître son point de vue et comprendre ses expériences.
Quelles sont les origines du Mois de la fierté?
Le Mois de la fierté a lieu en juin pour souligner l’anniversaire de l’émeute de Stonewall, un événement historique qui a eu lieu à New York en juin 1969, où des personnes LGBTQIA2S+ se sont rebellées contre les persécutions injustes et discriminatoires de l’homosexualité au Stonewall Inn. Et plus particulièrement Marsha P. Johnson, une femme transgenre noire, reconnue comme l’une des personnes ayant déclenché l’émeute.
Dites-nous pourquoi il est important pour vous que ce mois soit reconnu et célébré.
Le Mois de la fierté est important pour moi, car j’ai passé la majorité de ma jeunesse à avoir honte de qui j’étais et j’ai caché mon identité à la plupart des gens que je connaissais jusqu’au milieu de la vingtaine. Célébrer la fierté, c’est une façon de récupérer les années perdues où j’ai caché qui j’étais à moi-même, à ma famille et à mes amis.
La fierté est également importante pour moi parce qu’elle donne l’occasion aux enfants, aux jeunes et à quiconque cache son identité d’avoir un espace sécuritaire pour s’exprimer et être authentique, même si ce n’est que pour un après-midi au défilé de la fierté.
Célébrer la fierté, c’est se percevoir comme des gens qui méritent amour et respect en dépit de tout ce qui va à l’encontre de cette reconnaissance. La fierté est également importante pour moi en tant que militante, car elle me donne l’occasion de discuter des réalités vécues par de nombreuses personnes LGBTQIA2S+ et de l’ampleur du travail qui reste à faire : des lois aux politiques, en passant par le langage que nous utilisons et les ressources et livres d’apprentissage accessibles dans nos milieux d’apprentissage et de garde de jeunes enfants.
Décrivez le travail que vous faites. De quelles façons vos expériences vécues en tant que parent, EPEI et membre de la communauté queer se reflètent-elles dans votre travail?
Je travaille dans le domaine des ressources pour les enfants ayant des besoins particuliers, dans le sud-ouest de l’Ontario. Je fournis des ressources à des familles, des éducateurs, et plus particulièrement aux enfants ayant des besoins reconnus. De façon générale, mon travail consiste à animer des ateliers, à élaborer des fiches de conseils, à soutenir les familles et les éducatrices ou éducateurs sur une base individuelle, et à favoriser une conception universelle des éléments de l’apprentissage.
Mon expérience en tant qu’EPEI et parent queer me permet de cerner les défis surmontés par tout enfant queer qui grandit dans un environnement qui ne l’accepte pas et par tout un aidant queer qui veut désespérément que son enfant soit accueilli, accepté et représenté.
Je sais ce que c’est que de ne pas avoir de représentation dans les médias grand public. J’utilise cette intime connaissance pour protester contre le statu quo et ceux qui le maintiennent. J’agis en siégeant à des comités qui visent à démanteler l’homophobie et la transphobie, en offrant aux organismes des espaces sûrs et des formations anti-préjugés, en élaborant des fiches de conseils sur la façon de célébrer la fierté et l’inclusion, et en ayant une optique intersectionnelle en matière d’incapacité. Mais c’est surtout dans mes conversations quotidiennes avec mes collègues que j’agis, car j’ai l’incroyable privilège de travailler avec une grande variété d’éducatrices et d’éducateurs, de familles et d’organismes. J’ai l’occasion de partager des aspects de moi-même et de créer un espace sûr pour poser des questions.
Dans le cadre de conversations informelles, on m’a demandé ce que signifie « iel/ielle » ou bien « bisexuel/bisexuelle » par rapport à « pansexuel/pansexuelle », et s’il est vraiment possible que des enfants s’identifient comme étant transgenres. Je porte des épinglettes de pronoms et j’entame des conversations sur la façon dont je les utilise. Je suis très attentive au langage que j’emploie et je m’assure d’inclure tout le monde dans mon travail. La plupart de ces minimessages de défense viennent tout simplement du fait que je suis authentique et que j’entretiens, avec mes collègues, des relations qui favorisent un respect mutuel.
Comment créer, en tant qu’éducatrice ou éducateur de la petite enfance, un climat dans lequel tous les enfants et différents types de familles peuvent s’épanouir, quelles que soient leurs croyances personnelles?
Habituellement, nous ne connaissons pas l’identité d’un enfant de 0 à 6 ans, mais il y a des chances qu’au fil de sa carrière, chaque éducateur et éducatrice travaille avec des enfants et des familles queers et trans. En gardant cela à l’esprit, nous contribuons à universaliser notre langage et notre comportement pour que tous les enfants et toutes les familles, peu importe la façon dont ils/elles pourraient s’identifier, se sentent en sécurité et bien accueilli(e)s dans leur environnement. Nous y parvenons en offrant une représentation et en dénonçant les préjugés.
- La représentation peut notamment prendre la forme d’éléments visuels d’enfants et de familles de diverses identités de genre (p. ex., photos de personnes d’apparence masculine en robe, de familles queers sur du matériel promotionnel, etc.), de pronoms sur vos porte-noms/signatures de courriel, de livres montrant des familles et des enfants diversifiés, et disponibles toute l’année.
La représentation peut aussi passer par l’invitation d’un ou d’une artiste drag local(e) pour lire un conte à votre classe. Autrement, une vidéo peut aussi être une option.
- La dénonciation des préjugés peut notamment ressembler à ce qui suit :
- Demander aux enfants ce qu’ils veulent dire lorsqu’ils utilisent des stéréotypes fondés sur le genre et présument des structures familiales hétéronormatives (p. ex., les garçons ne portent pas de rose, chaque famille est formée d’une mère et d’un père, etc.);
- Avoir des conversations avec les enfants sur le fait que chaque personne est différente. Avoir des conversations difficiles avec des familles qui ont des croyances différentes et leur fournir des ressources pour déconstruire certains de leurs préjugés.
Comment les employeurs peuvent-ils prévenir et contrer les remarques ou les comportements potentiellement discriminatoires?
Je pense que le plus important, c’est de faire preuve d’un soutien indéfectible, bien avant que cela ne « devienne une obligation ». N’attendez pas qu’un éducateur ou une éducatrice sorte du placard pour apporter des changements. Créez une culture de « communication ouverte » et utilisez les ressources de la communauté pour voir ce qu’elle recommande. Attardez-vous à comprendre parfaitement à quoi ressemblent les microagressions et le harcèlement.
Au-delà de l’instauration d’une culture de « communication ouverte » et de « dénonciation », expliquez clairement la position de votre organisation sur ces questions. D’abord et avant tout, adoptez des politiques claires qui appuient la communauté queer et transgenre, auxquelles vous référer si une éducatrice ou un éducateur est victime de harcèlement de la part de collègues ou d’aidants. Cela pourrait se traduire simplement par « nous croyons qu’il faut favoriser un sentiment d’appartenance pour toutes les éducatrices et tous les éducateurs, tous les enfants et toutes les familles, y compris les éducatrices et éducateurs, les enfants et les familles LGBTQIA2S+ ». Profitez des occasions comme le Mois de la fierté pour affirmer la position de votre organisation sur l’inclusion de la communauté LGBTQIA2S+ en partageant des ressources pendant une réunion du personnel ou sur les médias sociaux. Offrez des possibilités de perfectionnement professionnel axées sur l’équité, la diversité et l’inclusion.
Et surtout, évitez de laisser continuellement tout le fardeau émotionnel aux membres de la communauté pour qu’ils fassent le gros du travail — agissez au lieu d’attendre que les autres personnes luttent seules en faveur du progrès à chaque étape. Tout cela est particulièrement important pour les personnes en situation moins privilégiée qui n’osent pas se plaindre et risquer leur gagne-pain en dénonçant une personne qui les harcèle. Encouragez tous les alliés et toutes les alliées à dénoncer les situations dont ils ou elles sont témoins et répondez clairement que vous prenez cette dénonciation au sérieux.
Pour les EPEI qui cherchent à en apprendre davantage sur la fierté et les communautés LGBTQIA2S+, Cora vous recommande quelques ressources destinées à votre apprentissage, que nous avons incluses dans un PDF téléchargeable et partageable.
De plus, vous pourriez trouver utiles les ressources de l’Ordre suivantes :
- Lignes directrices pratiques sur la diversité et la culture
- Lignes directrices pratiques sur le développement de l’enfant (en particulier, sections 2, 4 et 5)
- Notes pratiques sur les croyances et les préjugés
En savoir plus sur Cora Payne
Cora Payne, B.A. en psychologie de l’enfance, B.Ed. niveau primaire, EPEI, EAO (elle/ielle). En tant qu’EPEI travaillant dans le domaine des ressources pour les enfants ayant des besoins particuliers dans le comté d’Oxford, Cora a consacré sa carrière à la défense de tous les groupes en quête d’équité. Parce qu’ielle se passionne pour la diversité, l’équité et l’inclusion, ielle se dévoue à créer des environnements où chaque enfant, chaque famille et chaque éducatrice et éducateur ressent un profond sentiment d’appartenance. Au-delà de son parcours professionnel, Cora est aussi parent d’un enfant dynamique de trois ans qui l’inspire continuellement à plaider pour des espaces plus sécuritaires. En tant qu’EPEI queer et non binaire, Cora apporte une perspective unique à son travail, reconnaissant l’importance de la représentation et de la responsabilisation dans les milieux de l’éducation. Cet engagement se traduit souvent par un rôle de représentation. Autrement dit, Cora joue le rôle du modèle dont ielle aurait eu besoin pendant son enfance. Ielle participe à la déconstruction de l’ignorance et des préjugés fondés sur la peur. Tout au long de sa carrière dans les secteurs des organismes sans but lucratif et de l’éducation, Cora a été témoin du pouvoir transformateur de l’inclusion et de l’appartenance. Ielle veut apporter des changements radicaux dans le secteur de l’éducation, en défendant des politiques et des pratiques qui accordent la priorité aux besoins de tous les enfants, de toutes les familles et des éducatrices et éducateurs. Avec un dévouement inébranlable, Cora s’efforce d’avoir un impact durable, créant un avenir où chaque personne peut s’épanouir.