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Exercice professionnel

Conversations au temps de la COVID-19 : Taylor Jenkins EPEI

Cette série relate les expériences d’EPEI pour s’adapter en temps de pandémie.

Nous avons interrogé Taylor Jenkins EPEI, une consultante-ressource qui travaille aux services à l’enfance Andrew Fleck Children’s Services (AFCS) in Ottawa. AFCS a dû fermer temporairement son centre, mais ses employés travaillent à distance.

Q : Comment la COVID-19 a-t-elle influencé vos fonctions, vos relations professionnelles et votre milieu de travail?

A : On a dû s’adapter, car notre charge de travail, généralement axée sur le centre, a dû se porter sur la famille. Une grande partie de mes fonctions habituelles consiste à observer et à faire des recommandations, ce qui comprend la modélisation de stratégies spécifiques. J’ai dû passer à la communication à distance. C’est difficile de trouver les moyens de communiquer une stratégie en se heurtant à des obstacles comme la langue ou l’accès aux ressources. Par exemple, c’est difficile de recommander de travailler sur certaines activités sans être sûre des ressources disponibles pouvant être utilisées.

Certaines familles, que je ne connaissais pas, ont récemment été ajoutées à ma liste de dossiers. J’essaie de nouer une relation avec elles alors que les gens sont débordés ou très occupés. Nous devons maintenant savoir quoi faire en tant que professionnels et citoyens canadiens pour favoriser la santé et le bien-être des familles (par exemple, aider les familles à avoir accès aux livres et aux ressources, ou les aider à accéder aux produits de première nécessité).

Mon rôle traditionnel était très axé sur l’équipe, et maintenant il est plus individuel et direct. J’ai l’habitude d’encadrer les EPEI, pas les parents. Heureusement, cela nous a aussi permis de progresser dans l’élaboration de la formation en ligne et de nous mettre à l’aise avec les nouvelles technologies.

Q : La pratique, en ce moment, consiste à se soutenir mutuellement et à protéger notre santé ainsi que celle de nos familles et de nos communautés. Comment vous sentez-vous?

A : Parfois, je ne me sens pas sûre de moi, dépassée ou distraite. Chaque personne a une charge de travail différente, donc c’est parfois difficile de s’y retrouver. Je trouve qu’il est important de communiquer avec sa famille et de prendre du temps pour soi. Mon plus grand défi est de renoncer aux attentes sur la façon dont les choses devraient se faire. 

Q : Pendant cette période d’isolement et d’incertitude, que trouvez-vous utile pour favoriser votre santé physique, mentale et émotionnelle?

A : Heureusement, mon employeur a toujours favorisé un esprit de croissance et de soutien. Ainsi, lorsque je suis confrontée à un défi, je n’hésite pas à dire que j’ai besoin de conseils ou de soutien. L’accent est également mis sur le bien-être et la santé globale des employés, même avant la COVID-19 et tout au long de la pandémie. Je me sens donc soutenue et proche des autres. On fait régulièrement le point sur Zoom ou par téléphone, ce qui renforce ce sentiment de « connexion » et de soutien. J’ai une équipe solide qui me soutient, de sorte que je me sens suffisamment forte pour soutenir les familles

Dans ma vie de famille, mon partenaire ne travaille plus donc il est à la maison avec notre enfant de 18 mois. Je suis très heureuse de les voir créer des liens et j’apprécie le côté positif de la présence de mon partenaire à la maison. Je prends aussi le temps de passer quelques minutes avec eux lorsque je me sens enfermée. Je sais que le visage de mon fils qui s’invite à l’écran au cours des réunions est aussi un soutien pour mes collègues – même s’il vient de se réveiller et qu’il est grincheux.

Q : Les rapports humains sont au cœur de notre profession. Comment entretenir des relations collaboratives?

A : Mon équipe se réunit plus fréquemment pour communiquer et collaborer en utilisant des plateformes en ligne. La fréquence et le mode de communication avec les familles sont un peu différents pour chaque consultant-ressource.

Dans mon cas, j’ai reçu de nombreuses réponses des parents et je communique avec eux par courriel et par téléphone. Nous faisons de notre mieux pour nous rendre disponibles tout en reconnaissant que les parents, les familles et les éducateurs sont tous dans des situations uniques qui nécessitent une aide différente.

Q : Quels sont les défis que vous avez rencontrés pour nouer des relations et favoriser la collaboration en cette période d’éloignement physique?

A : C’est parfois difficile de tisser des liens quand il y a tant de distractions. Généralement, on est sur place et on noue des liens pendant que les éducatrices et les éducateurs accomplissent d’autres tâches. Il en va de même pour les parents qui jonglent avec le travail, la garde d’enfants, l’école à domicile, etc.

Essayer d’établir ces relations sans partager physiquement le même espace est un nouveau défi (par exemple, on ne sait pas s’il faut répéter quelque chose parce qu’ils n’entendent pas, qu’ils ne comprennent pas ou qu’ils sont distraits). Je reste consciente que, pour certains parents, je suis une étrangère au bout du fil qui s’enquiert de leur vie familiale.  

Q : Qu’apprenez-vous pour favoriser la sécurité, la santé et le bien-être des autres dans votre milieu d’exercice?

A : Mon équipe et moi avons eu des conversations intéressantes sur la nature évolutive de notre domaine, principalement autour du passage rapide à la formation en ligne. En raison de la nature de notre travail, on se rencontre fréquemment sur ce sujet, ce qui a donné lieu à des discussions intéressantes sur les défis et considérations liés à la formation en ligne. Il ne s’agit pas seulement d’accepter des présentations en personne et de les enregistrer. Il s’agit de réfléchir à la manière dont nous favorisons la participation et la réflexion, et à la façon dont nous évaluons l’apprentissage.

On constate également une augmentation du nombre de ressources en ligne pour soutenir la santé mentale sous tous ses aspects, y compris celle des enfants, des éducateurs et des parents. Récemment, j’ai pris contact avec notre centre de santé communautaire local pour me renseigner sur les soutiens qui dépassent normalement nos compétences (par exemple, l’accès à la nourriture).

Q : Pouvez-vous partager quelque chose de positif sur votre expérience des nouveaux modes de communication ou des nouvelles pratiques?

A : Je travaille généralement en étroite collaboration avec les éducatrices et les éducateurs du centre, qui sont mes principaux interlocuteurs pour savoir comment les choses se passent et de quelles ressources ou de quel soutien ils ont besoin. Maintenant que je suis en contact direct avec les familles, j’ai pu établir une relation plus solide avec les parents avec lesquels je n’avais peut-être eu que de brefs contacts auparavant. Pour les parents qui s’occupent de plusieurs enfants, qui travaillent à plein temps ou qui sont seuls, c’est parfois difficile d’avoir du temps pour nouer des liens. Je suis heureuse de pouvoir dire que j’ai enfin tissé des liens avec un parent qui correspond à l’une de ces catégories, et on ne pouvait plus se quitter au téléphone! C’est une période difficile pour beaucoup, mais c’est peut-être aussi le moment pour d’autres de respirer enfin et de créer ou de maintenir des liens positifs.

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